Avocats d'affaires au Brésil, entre bureaucratie et corruption
Le 25 mars 2014, l’avocat brésilien Vinicios Leoncio, a déposé un livre de plus de 7 tonnes et 41.266 pages devant le congrès de la ville de Brasilla pour dénoncer le poids de la bureaucratie dans son pays. Une illustration des obstacles que doivent écarter quotidiennement les avocats d’affaires.
"La corruption fait partie de notre quotidien, nous n’avons aucune raison de la nier.", explique Chantal Vanila Correia Pillet avocate au sein du cabinet Villemor Amaral Advogados. Un dossier bloqué, qui n’avancera qu’en contrepartie du versement d’une certaine somme d’argent, cela arrive souvent. Les tactiques pour faire face à cette corruption diffèrent d’un cabinet à l’autre : "Notre devoir est d’informer le client de la raison pour laquelle son dossier n’avance pas. Après s’il veut payer c’est de sa responsabilité", explique un avocat associé d’un cabinet brésilien réputé. "Au contraire, en tant qu’avocat conseil de notre client, nous devons essayer de toute faire pour ne pas en arriver là. Et si le versement d’argent se trouve être la seule solution alors nous reprenons le dossier depuis le début afin de changer d’interlocuteur." argumente Wassila Medjahdi Martins du cabinet Sicherle Advogados.
Des avancées législatives dans la lutte anti-corruption
Les ruses et l’imagination juridique ne sont peut être plus les seules solutions de lutte des avocats depuis la "Brazilian Clean Companies Act", loi anti-corruption entrée en vigueur le 29 janvier 2014. Cette dernière s’applique à toute entité juridique poursuivant des activités commerciales au Brésil, qu’elle soit nationale ou étrangère. Elle interdit le versement de pots-de-vin aux fonctionnaires quels qu’ils soient et tous paiements de facilitation.
Coup politique ou véritable arsenal juridique de lutte contre la corruption ? "Avec les différentes lois anti-corruption déjà existantes, certaines administrations brésiliennes sont tombés dans l’excès inverse, ce que l’on pourrait appeler une hystérie de compliance. Les blocages ne sont plus dus à la corruption mais à l’augmentation du nombre des vérifications demandées. Les mesures prises ont donc paradoxalement fait augmenter le poids de la bureaucratie.", souligne Alain Goulène, associé fondateur du cabinet Goulène & Gonçalvès. Au contraire, pour Chantal Vanila Correia Pillet, cette loi « offre un cadre à soumettre aux clients et par conséquent plus de légitimité à leur parler des risques de corruption. » Autre avantage, « les entreprises brésiliennes sont désormais vraiment intéressées pour adopter des règles internes de compliance. », affirme Paulo Brancher, associé du cabinet Barretto Ferreira e Brancher.
Un enthousiasme qui reste modéré car aucun décret d’application de cette loi n’a encore été publié à ce jour. Sans ce décret, les conditions de mise en œuvre des procédures reste floues pour les autorités judiciaires et administratives compétentes. Reste donc à savoir si la Brazilian Clean Companies Act ne va pas demeurer tout simplement lettre morte.
Article publié sur le site du Monde du Droit, le 23 avril 2014
"La corruption fait partie de notre quotidien, nous n’avons aucune raison de la nier.", explique Chantal Vanila Correia Pillet avocate au sein du cabinet Villemor Amaral Advogados. Un dossier bloqué, qui n’avancera qu’en contrepartie du versement d’une certaine somme d’argent, cela arrive souvent. Les tactiques pour faire face à cette corruption diffèrent d’un cabinet à l’autre : "Notre devoir est d’informer le client de la raison pour laquelle son dossier n’avance pas. Après s’il veut payer c’est de sa responsabilité", explique un avocat associé d’un cabinet brésilien réputé. "Au contraire, en tant qu’avocat conseil de notre client, nous devons essayer de toute faire pour ne pas en arriver là. Et si le versement d’argent se trouve être la seule solution alors nous reprenons le dossier depuis le début afin de changer d’interlocuteur." argumente Wassila Medjahdi Martins du cabinet Sicherle Advogados.
Des avancées législatives dans la lutte anti-corruption
Les ruses et l’imagination juridique ne sont peut être plus les seules solutions de lutte des avocats depuis la "Brazilian Clean Companies Act", loi anti-corruption entrée en vigueur le 29 janvier 2014. Cette dernière s’applique à toute entité juridique poursuivant des activités commerciales au Brésil, qu’elle soit nationale ou étrangère. Elle interdit le versement de pots-de-vin aux fonctionnaires quels qu’ils soient et tous paiements de facilitation.
Coup politique ou véritable arsenal juridique de lutte contre la corruption ? "Avec les différentes lois anti-corruption déjà existantes, certaines administrations brésiliennes sont tombés dans l’excès inverse, ce que l’on pourrait appeler une hystérie de compliance. Les blocages ne sont plus dus à la corruption mais à l’augmentation du nombre des vérifications demandées. Les mesures prises ont donc paradoxalement fait augmenter le poids de la bureaucratie.", souligne Alain Goulène, associé fondateur du cabinet Goulène & Gonçalvès. Au contraire, pour Chantal Vanila Correia Pillet, cette loi « offre un cadre à soumettre aux clients et par conséquent plus de légitimité à leur parler des risques de corruption. » Autre avantage, « les entreprises brésiliennes sont désormais vraiment intéressées pour adopter des règles internes de compliance. », affirme Paulo Brancher, associé du cabinet Barretto Ferreira e Brancher.
Un enthousiasme qui reste modéré car aucun décret d’application de cette loi n’a encore été publié à ce jour. Sans ce décret, les conditions de mise en œuvre des procédures reste floues pour les autorités judiciaires et administratives compétentes. Reste donc à savoir si la Brazilian Clean Companies Act ne va pas demeurer tout simplement lettre morte.
Article publié sur le site du Monde du Droit, le 23 avril 2014